Des espaces ouverts liés à l'eau
Jamais très loin d’un cours d’eau ou de zones humides (tourbières, étangs…), ces prairies s’apparentent parfois à des marais et sont caractérisées par l’engorgement temporaire du sol où elles sont installées.
Cette présence d’eau, plus ou moins longue, peut être causée par la crue d’une rivière ou par une remontée de la nappe phréatique.
Selon le degré d’humidité, l’acidité ou à l’inverse l’alcalinité et la richesse des sols en éléments nutritifs (azote, phosphore…), les plantes, dominées par les graminées, vont être différentes.
Dans les vallées du Loir, de l’Eure, du Fouzon et de la Loire, et de leurs affluents, on rencontre des prairies sur les sols constitués d’alluvions déposées par la rivière. Parfois en contact permanent avec la nappe alluviale, elles peuvent être humides toute l’année. On en trouve également sur les terrains argileux et sableux de Sologne, du Perche, de la Brenne et du Boischaut sud où elles sont localement marécageuses.
Un sol riche et gorgé d’eau en permanence accueillera une mégaphorbiaie, « prairie » à herbes hautes et à feuilles larges, caractérisées par la présence de nombreuses plantes à floraison colorée comme la Reine des Prés ou le Pigamon jaune...
Les prairies naturelles, des milieux naturels liés à l'eau
Des richesses caractéristiques des zones humides
La présence plus ou moins saisonnière d’eau permet l’expression d’une flore et d’une faune riches.
Selon la richesse du sol et sa durée d’engorgement y fleurissent la Gratiole ou la Sanguisorbe officinale, espèces protégées en France pour la première et en région Centre pour la seconde, mais aussi des orchidées comme l’Orchis à fleurs lâches ou encore la Fritillaire pintade, également protégées.
La flore s’accompagne souvent d’un cortège animal composé d’amphibiens, de petits mammifères et surtout de nombreux insectes. Parmi ces derniers, des papillons patrimoniaux, comme le Damier de la succise, ou des criquets comme le Criquet ensanglanté, ne se rencontrent que dans ce type de milieu. Qui dit richesse en insectes dit présence de nombreux oiseaux, dont les prairies accueillent la reproduction, avec des espèces comme le Courlis cendré, le Tarier des prés, la Pie-grièche écorcheur, le Héron cendré ou l’Aigrette garzette, en quête de grenouilles, ou encore le Râle des genêts, menacé dans le monde entier et qui a perdu, selon la Ligue pour la Protection des Oiseaux, 70 % de ses effectifs entre 1983 et 2003.
Des zones demeurant en eau plus longtemps et connectées à la rivière forment aussi de très bonnes frayères pour la reproduction du brochet, poisson qui se raréfie en région Centre.
Ces prairies ont aussi un intérêt fonctionnel en termes d’absorption des crues, de filtration et d’épuration des eaux. Les paysages fleuris qu’elles offrent sont en outre parmi les plus appréciés.
Des milieux entretenus par l’homme !
La plupart de ces prairies ont de tout temps été maintenues par des pratiques traditionnelles et extensives telles que le pâturage et la fauche pour la production de fourrage.
Comme pour tous les milieux ouverts, la déprise agricole a souvent entraîné leur drainage et leur reconversion en cultures céréalières, de maïs ou de peupliers. Pour les secteurs aux sols plus pauvres, l’abandon, bien souvent synonyme d’évolution vers une prairie à hautes herbes puis vers le boisement progressif, ne leur a pas toujours été plus favorable.
Déprise ou intensification agricole ou encore urbanisation ont entraîné depuis les années 1960 la disparition de plus de la moitié de ces prairies à l’échelle nationale.
Comme tous les milieux liés à la rivière, elles sont aussi sensibles aux modifications de la dynamique du cours d’eau. L’enfoncement de ce dernier et, parallèlement, celui de sa nappe alluviale, peuvent signifier la diminution de la fréquence et de la durée d’engorgement de la prairie, et donc la modification de sa composition en plantes.
Les facteurs de réduction des surfaces de prairies
Garder des prairies naturelles
Afin d’éviter que l’évolution naturelle ne les transforme en friche puis en boisement, il est nécessaire d’agir et de faire perdurer les pratiques qui ont créé et maintenu ces prairies : fauche ou pâturage.
Afin de ne pas nuire à certaines espèces et notamment aux oiseaux et aux mammifères qui s’y reproduisent ou encore aux insectes, cette intervention doit être réalisée tardivement. Selon les secteurs et les espèces présentes, elle peut avoir lieu à partir du 15 juin, après la période de floraison des plantes, et parfois être retardée jusqu’à septembre pour permettre la nidification des oiseaux. Ces compromis entre exigences biologiques des espèces et qualité du foin moindre sont consentis par des agriculteurs soucieux de préserver la biodiversité.
D’autres adaptations des pratiques peuvent être utiles. Une fauche dite « centrifuge », commençant par le centre et s’élargissant vers la périphérie, est également bénéfique car elle permet aux animaux de fuir avant l’arrivée de l’engin. Il est préférable, comme pour les pelouses, d’exporter les produits de la fauche afin de ne pas enrichir le sol. Dans le même sens, l’apport d’engrais ou de produits phytosanitaires doit être limité.
Bien que moins souhaitable, la restauration des prairies est néanmoins possible, par exemple sur d’anciennes plantations de peupliers, grâce au réensemencement avec des espèces comme le trèfle, les fétuques ou la luzerne.
Concilier le maintien des prairies et l'activité humaine
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